Voici des extraits d'un article de Vincent Dufief avocat,dans Le journaldunet Parolesd'expert) que j'ai eu envie de vous communiquer....
Le principal risque engendré par ces sites de socialisation, et probablement le plus sérieux, est celui d'une violation librement consentie de sa vie privée, dont nul ne maîtrise les conséquences actuelles ni futures. En effet, sur ces sites, la divulgation de la vie privée est le fait de l'utilisateur lui-même, qui affiche des informations personnelles telles que ses opinions politiques, ses croyances religieuses, son carnet d'adresses, voire même son orientation sexuelle.
Certes, rien n'oblige l'utilisateur à en dire autant et aucune loi ne réprime le fait de divulguer sa propre vie privée. Pour autant, il n'en demeure pas moins que la politique de ces sites est clairement d'inciter leurs utilisateurs à révéler le maximum d'éléments de leur vie privée et au plus grand nombre de personnes...
En effet, bon nombre d'utilisateurs n'osent fermer les portes de leur vie privée à leurs relations, par crainte d'en vexer certains ou de se créer des inimitiés. Surtout, ces sites reposent sur un principe de réciprocité imposant de révéler sa propre vie privée afin d'accéder à celle des autres.
Ce faisant, certains utilisateurs se trouvent piégés par le système et ne recourent pas aux outils de protection de la vie privée pourtant proposés sur ces sites.
Face à cette incitation, les utilisateurs se doivent d'être particulièrement prudents et garder à l'esprit que la révélation d'information n'est pas forcément circonscrite ni dans l'espace, ni dans le temps : l'information peut en effet être consultée par d'autres personnes que celles auxquelles on a cru en limiter l'accès et rester accessible sur Internet pour une durée illimitée.
L'information peut également être reprise par des personnes mal intentionnées. Tel serait par exemple le cas d'un utilisateur qui se retrouverait dans les fichiers d'une secte après avoir renseigné ses opinions religieuses sur sa fiche Facebook. Sans aller jusqu'à des cas aussi dramatiques, il est aussi fort probable que les employeurs mènent de petites enquêtes sur ces sites avant de recruter un candidat...
Les atteintes pouvant émaner des tiers
Si certains risques trouvent directement leur origine dans l'attitude de l'utilisateur qui ne protège pas suffisamment son intimité, d'autres proviennent directement des agissements de tiers.
D'une part, force est de constater qu'en permettant à chaque utilisateur de divulguer à l'ensemble de son entourage des photographies et des informations sur une personne, il se crée un canal idéal pour relayer des atteintes à la vie privée et au droit à l'image, voire des diffamations.
Prenons par exemple cette fonctionnalité qui permet à chacun de publier des photographies de ses amis sur sa fiche : il est clair qu'une telle publication peut constituer une atteinte au droit à l'image dés lors que la personne représentée n'a pas donné son accord à une telle diffusion. Hugh Grant et de nombreuses personnalités ont déjà été victimes de ce phénomène...
Surtout, cette fonctionnalité semble relativement pernicieuse dans la mesure où elle permet à une personne inscrite de diffuser la photographie d'une autre non-inscrite sur le site, de sorte que cette dernière, qui n'aura pas connaissance de cette publication, ne pourra en restreindre la diffusion.
D'autre part, ces sites permettent incontestablement de faciliter les usurpations d'identité. N'importe qui peut en effet créer un profil reprenant les éléments d'identité d'autrui, puis en user à des fins plus ou moins maîtrisables. On peut ainsi imaginer que de telles usurpations d'identité soient commises à des fins de renseignement sur autrui ou pour commettre certaines escroqueries.
Le plus préoccupant est certainement la constitution d'un véritable fichier de la population, particulièrement complet et d'une totale fiabilité puisque implémenté par les personnes elles-mêmes.
Nul n'est aujourd'hui capable de prévoir les utilisations futures de ces données et les risques évidents de détournement.
On n'ose pas parler de détournement à des fins commerciales, tant l'ouverture de ces sites aux annonceurs - qui vient d'avoir lieu sur Facebook - était évidente et prévisible.
On peut tout de même se poser la question des limites et de l'encadrement de cette utilisation commerciale, et de l'accord des personnes pour une telle utilisation.
En outre, et au delà de ce risque de détournement commercial, il convient de s'interroger - sans tomber dans le catastrophisme - sur la possibilité de détournements aux conséquences bien plus graves qui pourraient, dans le futur, être le fait de gouvernements ou d'organisations criminelles...
A côté de cette menace d'utilisation détournée du système, le développement de ces sites conduit à évoquer un dernier péril, qui a déjà commencé mais dont les conséquences ne pourraient apparaître que plus tard, celui de faire perdre à une génération entière le réflexe de protéger sa vie privée et ses données personnelles.