Voilà l'automne, propice au coup de blues !
Avec toutes ces fleurs dans les magasins pour la Toussaint, je pense beaucoup à ma mère décédée en février 2007. Je la vois dans ma tête avec son petit peignoir bleu, marchant dans la maison, silencieuse, pensive, inquiète devant son avenir reduit à quelques mois par la maladie qui la rongeait. Qu'a-t-elle pu bien se dire en elle-même ?
Elle avait toujours eu peur du cancer et au moindre bobo, elle s'est toujours imaginé le pire. On en a beaucoup ri et je lui avais dit de nombreuses fois : "A force d'en avoir peur, tu vas te le déclencher !"
Jusqu'à ce Noël 2005 où elle m'a dit qu'elle n'allait pas bien du tout et qu'elle sentait l'odeur de la mort sur elle ! Elle m'a fait tellement peur que ma réaction a été de la houspiller. Elle n'avait pas le droit de dire des choses comme ça ! Elle, toujours sportive, soignée, vaillante et dure à la douleur ! Une très belle femme de 74 ans que l'on prenait pour ma soeur et cela me faisait plaisir pour elle ; j'étais fière d'elle et je claironnais à tout vent son âge pour voir le regard étonné des gens autour de moi ! Elle faisait la timide mais je crois que cela la flattait beaucoup.
Bref, cela allait de plus en plus mal et en avril suivant, le verdict est tombé. Le médecin, devant sa panique, a minimisé les choses : c'était juste un petit cancer de rien du tout. Quelques séances de radiothérapie et tout rentrerait dans l'ordre. J'ai espéré moi aussi car elle allait mieux pendant les séances de rayons. Puis, en septembre, la douleur est revenue en pire ! La tumeur n'était pas morte. On est passé aux patches de morphine.
Dans l'année qui avait précédé, on avait décidé de vendre leur maison et qu'elle viendrait habiter près de chez nous, avec Papa malade depuis 2 ans de la maladie d'Alzheimer.On leur avait trouvé un appart à 500m de chez nous.
En octobre 2006, on les a déménagés sur Rennes. Mais Maman était incapable de rester seule avec Papa chez elle. Je les ai recueillis tous les deux à la maison, en attendant qu'elle aille mieux et puisse prendre en main Papa.Un nouveau médecin spécialiste avait pris le relais pour les soins de Maman. Après l'avoir examinée, il m' demandé de venir le voir seule avec mon mari et nous a annoncé qu'il fallait envisager les soins palliatifs le plus tôt possible car pour elle c'était une affaire de quelques mois. Le ciel m'est alors tombé sur la tête !
Lors de ses examens, le médecin lui disait qu'elle allait guérir et qu'il fallait garder courage et confiance, c'était le gage de sa guérison. Elle faisait des projets d'avenir avec moi à ses côtés. On devait aller faire de la marche ensemble, nos courses ensemble, se boire un petit café en ville toutes les deux, comme deux copines. Faire tout ce que l'on avait jamais pu faire vraiment car nous avons toujours habité loin l'une de l'autre.
Puis, ça s'est dégradé tout d'un coup avant Noël. Elle a été hospitalisée et n'est plus jamais revenue à la maison. Je suis allée la voir tous les jours. On passait 2 ou 3 heures ensemble l'après-midi, je lui faisais boire un petit café avec quelques biscuits (elle était si décharnée et ne mangeait presque plus), je lui faisais des petits soins du visage, des massages des pieds et des jambes, je lui parlais de ses petits-enfants, de ses enfants à elle (mes frères et soeurs), de Papa qui était chez moi sous surveillance ; elle me disait, dans ses délires de morphine, qu'il fallait absolument que je trouve une maison pour y placer Papa, que je ne pouvais pas gâcher ma vie de famille avec lui sur les bras, surtout avec l'évolution prévisible de son état mental.
Elle divagait beaucoup, voyait des choses bizarres mais toujours m'a souri en me regardant. Quand je la quittais le soir, je lui disais : "Maman, je reviens demain après-midi, attends-moi !".C'était une façon de lui dire de résister et de se battre. Puis, elle est tombé dans le coma, deux jours après c'était fini !
Quand je l'ai revue à la chambre funéraire de l'hôpital, elle était transfigurée ; on ne l'avait pas encore maquillée, mais elle avait rajeuni de 20 ans : une peau diaphane, plus de cernes, le visage lisse et un petit sourire sur les lèvres. Je l'ai embrassée et j'ai beaucoup pleuré sur ses mains croisées.
Depuis 2 ans, je lui parle, je lui dis que j'ai encore besoin d'elle pour lui confier mes soucis et mes inquiétudes, l'entendre rire devant mes plaisanteries, j'ai encore besoin de ses conseils et de sa naïveté si fraîche ! M'entend-elle ? Beaucoup de problèmes ont été résolus depuis qu'elle est partie, des choses terribles évitées : est-ce elle qui, là où elle est, intervient pour que tout s'arrange ?
Voilà, mon discours a été bien long mais j'avais besoin de parler d'elle. Même si plus personne ne vient lire mon blog, ce n'est pas grave, j'ai écrit cela, pas pour étaler ma vie et mon chagrin, mais pour parler d'elle, pour laisser encore une trace d'elle dans ce monde et en reparlant de tout ça, j'ai l'impression qu'elle est tout près de moi.
Je t'aime Maman.